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Droit du Travail
par Sébastien Millet

Harcèlement sexuel : le point sur l’abandon des poursuites pénales


Dans une décision rendue le 4 mai 2012 dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel vient de déclarer contraire à la constitution le texte faisant du harcèlement sexuel un délit pénalement répréhensible.

Cette décision n’a pas manqué de susciter de forte réactions, sachant que toutes les affaires non définitivement jugées ou poursuites en cours à la date du 5 mai 2012, et fondées sur l’article 222-33 du Code pénal, sont annulées.

S’agissant d’un texte d’incrimination pénal, le Conseil constitutionnel a choisi de prononcer l’abrogation immédiate du texte, avec un effet erga omnes.

La responsabilité en revient ici au législateur, qui a successivement modifié la définition de l’infraction pour retenir au final comme définition légale avec la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, « le fait de harceler autrui dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle ».

La notion d’abus d’autorité liée aux fonctions a ainsi été supprimée, donnant à cette incrimination un champ d’application beaucoup plus vaste allant ainsi au-delà du cadre professionnel et des seuls agissements commis par un supérieur hiérarchique (l’infraction n’était plus uniquement « verticale »). Exit également la référence -limitative- à des ordres, contraintes, pressions graves ou menaces.

Or, en voulant renforcer la protection des victimes par une définition plus large, le législateur a en fait permis selon le Conseil constitutionnel « que le délit de harcèlement sexuel soit punissable sans que les éléments constitutifs de l’infraction soient suffisamment définis », ce qui est contraire au principe fondamental de légalité des délits et des peines (cf. DDHC, art. 8), qui est au cœur de notre Etat de droit et suppose, nul n’étant censé ignorer la loi, que l’infraction pénale soit prévisible du point de vue de son élément matériel.

Reste maintenant au législateur à revoir sa copie au niveau du droit pénal général, sans possibilité d’effet rétroactif.

A noter que pour ce qui concerne les relations de travail, l’infraction définie par l’article L1155-2 du Code du travail, et qui réprime avec les mêmes peines aussi bien les faits de harcèlement sexuel que moral (15000 euros d’amende et 1 an d’emprisonnement maximum), n’est pas abrogé en l’état.

On peut toutefois penser qu’en cas de contentieux, les mêmes causes produisant les mêmes effets, ce texte de droit pénal spécial subirait le même sort puisqu’il est renvoyé à la définition du harcèlement sexuel du L1153-1, libellée dans les mêmes termes que l’article 222-33 du Code pénal …

Par opposition, la définition du harcèlement moral est plus précise dans ses éléments constitutifs (cf. C. Pénal, art. 222-33-2).

Affaire à suivre.



Sébastien Millet

Avocat associé, Bordeaux

J'ai une activité multiple (conseil juridique, défense au contentieux, formation, enseignement et publications), mais un leitmotiv : la transversalité des disciplines et le management des risques humains sous toutes ses formes, au service de l'entreprise. L'exercice est aussi exigeant que passionnant.

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