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Droit du Travail
par Guillaume Dedieu

Associations culturelles et socio-éducatives : attention au caractère temporaire de l’emploi dans le recours au CDD d’usage


L’article L.1242-1 du code du travail dispose qu’  « un contrat de travail à durée déterminée peut être conclu, dans certains secteurs définis par décret ou convention collective étendue,  pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ».

 

Parmi les secteurs définis par décret (cf. liste fixée par l’article D.1242-1 du code du travail), on retrouve les centres de loisirs et de vacances, ainsi que le secteur de l’action culturelle. De nombreuses entreprises relevant de la branche professionnelle de l’animation, notamment les associations culturelles et socio-éducatives, figurent ainsi dans les secteurs d’activités autorisées.

 

Outre l’appartenance à l’un des secteurs d’activité listés, le motif de l’usage ne se justifiera que si l’emploi à pourvoir présente un caractère temporaire, c’est-à-dire qu’il n’est pas durable et ne relève pas de l’activité normale et permanente de l’entreprise.

 

Par conséquent, l’appartenance à l’un des secteurs d’activités listés par le code du travail ne suffit pas. L’employeur devra toujours établir l’existence d’éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de cet emploi (Cass. Soc. 23 janvier 2008 n° 06-43.040).

 

La  Cour d’appel de Toulouse (CA Ch. Soc. Toulouse 22 mai 2014 n°12/06709) a été amenée à appliquer cette solution à propos d’une association d’éducation populaire relevant de la CCN de l’animation.

 

En l’espèce, une association d’éducation populaire et laïque a engagé un animateur scientifique en contrat de travail à durée déterminée, au motif de l’usage, pour une durée de 2 mois. L’association a par la suite conclu plusieurs autres contrats à durée déterminée avec ce même salarié, pour les mêmes fonctions d’animateur scientifique puis pour des fonctions de responsable animation scientifique et scolaire.  Ces contrats successifs étaient entrecoupés de périodes d’interruption (dont la durée variait de 15 jours à 9 mois).

 

A l’issue du dernier contrat, le salarié a saisi le Conseil de Prud’hommes d’une demande de requalification de l’ensemble de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée. Il sollicitait en conséquence l’octroi des différentes indemnités liées à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

A cette fin, le salarié soutenait que, malgré l’usage propre à son secteur d’activité, il occupait un poste lié à l’activité normale et permanente de l’association.  Le salarié justifiait son appréciation en  établissant que tant son prédécesseur que son successeur sur ses fonctions de responsables d’animations scientifiques avaient été engagés en contrat de travail à durée indéterminée.

 

En défense, l’association arguait que le recours au contrat à durée déterminée était d’usage dans la profession, que les tâches confiées au salarié ne correspondaient pas à celles des salariés en contrat à durée indéterminée et que la relation contractuelle a été interrompue pendant plus de six mois entre deux contrats successifs.

 

A la question de savoir si le motif de recours au contrat à durée déterminée était valable, la Cour d’appel va répondre par la négative et prononcer la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée.

 

Elle soutient à cet effet que si l’action culturelle et les centres de loisirs et vacances figurent bien parmi les secteurs d’activités pouvant recourir au contrat à durée déterminée d’usage, il n’en demeure pas moins que l’association n’établit pas d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné. Or, dans les pièces du dossier, il était au contraire démontré que l’association avait embauché, en contrat de travail à durée indéterminée, un salarié pour des fonctions similaires à celles exercées par le salarié requérant.  Dès lors, l’usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois était remis en cause.

 

La Cour d’appel fait dès lors droit aux demandes d’indemnisation du salarié au titre de la requalification et d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

Pour les employeurs accomplissant des missions d’animation et d’éducation populaire, l’appartenance au secteur de l’activité culturelle et des centres de loisirs ne suffira donc pas pour sécuriser un recrutement en contrat à durée déterminée. Il s’agira également d’établir que l’emploi concerné est bien par nature temporaire, sous peine d’une requalification en contrat à durée indéterminée.

 

Les associations culturelles et socio-éducatives doivent donc adopter la plus grande prudence dans la détermination des emplois pouvant faire l’objet d’un contrat de travail à durée déterminée en raison de l’usage.

 

A noter : concernant les animateurs et directeurs occasionnels de centres de loisirs ou de vacances, le recrutement peut également s’opérer à travers le contrat d’engagement éducatif.



Guillaume Dedieu

Avocat associé, Paris

Après l'obtention de son Master 2, intègre plusieurs fédérations sportives pour intervenir sur les questions d'emploi, de ressources humaines et de relations sociales. Exerce en qualité d'avocat au sein du cabinet Ellipse Avocats depuis 2014 à Lyon puis à Paris. Devient associé du bureau parisien au 1er janvier 2020.

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