XS
SM
MD
LG
XL
Droit de la Protection Sociale, Droit du Sport
par Guillaume Dedieu

Rémunération des dirigeants d'associations : attention au respect des statuts


 

Un organisme sans but lucratif (OSBL) ainsi que toute association régie par la loi de 1901 peuvent décider que l’exercice des fonctions dévolues à leurs dirigeants justifie le versement d’une rémunération. Dans le cadre des dispositions de l’article 261 -7-1°-d) du code général des impôts ou de la tolérance administrative, cette décision peut, sous certaines conditions, ne pas remettre en cause la gestion désintéressée de l’association et par conséquent, ne pas impliquer son assujettissement aux impôts commerciaux (pour en savoir plus sur ce dispositif et ses conditions, voir l’article de Xavier AUMERAN : Rémunération des dirigeants d’association : c’est possible et autorisé !).

 

Néanmoins, la mise en place dans une association d’une rémunération de dirigeants implique une mise en conformité de ses statuts. Cela implique également que les dirigeants en exercice se conforment aux statuts dans la décision même d’octroyer une rémunération aux dirigeants

 

Pour toute explication, il conviendra de distinguer les exigences propres aux associations souhaitant rémunérer leur dirigeant pour une somme inférieure à ¾ du SMIC (soit moins de 13 117,65 euros sur l’année 2015) des exigences imposées aux associations souhaitant dépasser ce seuil de rémunération.

 

1ère situation : la rémunération est inférieure à ¾ du SMIC

 

Cette situation résulte d’une position expresse de l’administration fiscale (BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20). Dans ce cas, il est nécessaire d’une part, de s’assurer que les dirigeants ne procèdent pas en soi à une répartition de l’actif de l’association et d’autre part, de se prémunir contre des risques de nullité qui reposent sur la décision de verser une rémunération.

 

A cette fin, les statuts de l’association ne devront pas interdire le principe même de la rémunération. Si l’interdiction existe, toute personne ayant un intérêt à agir pourra obtenir en justice la nullité de la décision de rémunérer un dirigeant. De même, une transparence a minima devra être assurée dans la décision actant la rémunération d’un ou plusieurs dirigeant. Ainsi, la décision devra être prise par l’organe collégial de l’association, en dehors de la présence du dirigeant concerné et en suivant précisément les règles statutaires de cet organe collégial (convocation, quorum, condition de majorité…).

 

2ème situation : la rémunération est supérieure à ¾ du SMIC

 

Plusieurs enjeux sont liés aux statuts dans le cas de la rémunération des dirigeants des grandes associations (a minima plus de 200 000 euros de budget, hors ressources publiques), dont le montant versé peut excéder 3/4 du SMIC.

 

– en premier lieu, il est nécessaire que les statuts prévoient explicitement la possibilité pour l’association de rémunérer un dirigeant. D’une part, cela garantit la transparence dans le fonctionnement de l’association, cette transparence étant une exigence générale de l’article 261-7-1°-d) du code général des impôts. D’autre part, il s’agit d’un premier acte à opposer face à une action en nullité de la décision de rémunérer un dirigeant.

 

Une rédaction expresse et précise de la faculté pour l’association de rémunérer un dirigeant est donc nécessaire. Dans l’éventualité où les statuts seraient silencieux sur la rémunération des dirigeants, il conviendra, avant toute prise de décision, de procéder à une modification des statuts, dans le respect du cadre juridique applicable.

 

– en second lieu, le suivi des statuts est impératif lors de la prise de décision actant la rémunération et en fixant le montant. L’administration fiscale se fonde en effet sur les statuts pour analyser la réalité de la transparence financière de l’association. Elle précise à cet effet que la décision doit être prise par un vote de l’instance délibérative statutairement compétente. Une étude des statuts sera ici nécessaire pour déterminer l’instance compétente. L’administration fiscale exige en outre que cette décision soit prise à la majorité des deux tiers des membres présents de l’instance compétente. Une analyse de la notion de « membre de l’association » devra alors être mise en œuvre. Au regard des enjeux, la décision doit enfin être écrite, signée et conservée.

 

– en troisième lieu, l’article 242-C de l’annexe II du code général des impôts, repris par l’administration fiscale, sollicite, pour garantir la transparence financière, que le représentant statutaire, ou le commissaire aux comptes, présente à l’instance délibérante un rapport sur les conventions prévoyant la rémunération d’un ou plusieurs dirigeants.

 

– en dernier lieu, l’article 261-7-1°-d°) du code général des impôts dispose que l’association doit pouvoir justifier l’élection régulière et périodique de ses dirigeants ainsi que le contrôle effectif de sa gestion par ses membres. Les statuts seront ici les premiers garants de ce fonctionnement démocratique. Dans les faits, ils ne pourront fixer une trop longue durée aux mandats de dirigeant. Ils devront également prévoir, au sein de l’association, des possibilités de candidatures aux fonctions de dirigeant pour l’ensemble de ses membres. Le « verrouillage » de l’association, notamment par ses membres fondateurs, est ici déconseillé sous peine de remettre en cause la gestion désintéressé. Enfin, concernant le contrôle effectif de la gestion de l’organisme par ses membres, l’organisation régulière de réunion avec l’ensemble de ses membres (en assemblée générale ou sous une autre forme) doit être assurée, en suivant les éventuelles modalités de tenue de ces réunions édictées par les statuts. Ces réunions devront donner lieu à la transmission d’informations suffisantes pour permettre un contrôle par les membres de l’association.

 

Au final, les statuts constituent donc un instrument crucial pour instaurer régulièrement puis pérenniser une rémunération de dirigeant dans une association.



Guillaume Dedieu

Avocat associé, Paris

Après l'obtention de son Master 2, intègre plusieurs fédérations sportives pour intervenir sur les questions d'emploi, de ressources humaines et de relations sociales. Exerce en qualité d'avocat au sein du cabinet Ellipse Avocats depuis 2014 à Lyon puis à Paris. Devient associé du bureau parisien au 1er janvier 2020.

Contactez nous

Obtenez le meilleur conseil
en droit du travail pour votre entreprise

Obtenir du conseil

Confidentialité et réactivité
Nos avocats interviennent partout en France