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Droit du Travail
par Guillaume Dedieu

Le point sur l’indemnité inflation de décembre 2021


Le jeudi 21 octobre 2021, le Premier Ministre Jean Castex annonçait la création d’une « indemnité inflation ».

D’un montant forfaitaire de 100 euros pour le large public ciblé par le gouvernement, cette indemnité serait sans contributions sociales et défiscalisée pour les salariés.

Ce dispositif d’aide vise à pallier la hausse des prix (inflation), notamment de l’énergie, et se veut facile d’accès pour tout citoyen.

Concernant les salariés, ce dispositif imposerait toutefois aux entreprises d’organiser son versement avant de solliciter un remboursement.

Face à cette annonce qui sera vraisemblablement produit d’effets avant la fin de l’année, une explication synthétique du mécanisme envisagé et ses enjeux est opportune.

Le présent article a été rédigé en date du 25 octobre et a été mis à jour le 5 novembre 2021.

 

Quel va être le véhicule législatif ?

Le mécanisme intègre, pour les salariés, un second projet loi de finances rectificative pour l’année 2021 (afin d’être appliqué dès décembre). Des aménagements parlementaires sont donc à prévoir. Un décret viendra ultérieurement préciser les conditions de ressources requises pour les bénéficiaires de cette aide exceptionnelle.

A l’instar de nombreux dispositifs exceptionnels, des circulaires et des questions réponses devraient en complément être publiées par les administrations concernées (fiscale, sécurité sociale et travail).

 

Quels sont les salariés concernés ?

Selon l’exposé des motifs du projet de Loi, Le versement de cette indemnité concernerait le salarié, dont la résidence fiscale est en France dont le contrat est en cours au mois d’octobre. Il serait donc indifférent que le salarié ne soit plus employé au moment du versement (en décembre).

Le salarié peut prétendre au bénéfice de cette aide qu’il soit à temps complet ou à temps partiel, en contrat à durée déterminée ou indéterminée.

Le versement de l’indemnité inflation est toutefois soumis à un plafond de revenu : le salaire des bénéficiaires ne doit pas dépasser le plafond de 2 000 euros net par mois avant prélèvement à la source. Est visé le net social et non le net fiscal.

Afin de neutraliser les variations de salaire en fonction de certains mois (par exemple, des primes versées en fin d’année qui gonfleraient le salaire et fausseraient la rémunération réellement perçue durant l’année), le gouvernement prévoit, dans l’évaluation préalable à la mise en place le mécanisme suivant : « le plafond de rémunération sera apprécié en fonction de la rémunération brute perçue par les bénéficiaires depuis le début de l’année 2021 pour être égal à 2000 euros nets par mois, avant application du prélèvement à la source et des déductions éventuelles opérées par l’employeur en plus des cotisations et contributions légales ». En pratique, l’aide sera donc versée aux salariés ayant perçu une rémunération totale brute inférieure à 2 600 € par mois en moyenne sur la période depuis janvier.

Cette indemnité est enfin individualisée : ainsi, il est indifférent qu’un couple gagne plus de 2 000e, tant que chacun d’eux perçoit un salaire inférieur au plafond.

Seule la condition de ressources du salarié est appréciée : le versement ne l’indemnité n’est pas conditionné à la possession d’un véhicule.

A noter : les prestations sociales complémentaires (par exemple : la prime d’activités) ne devraient pas être prises en considération pour le calcul de l’indemnité. C’est la rémunération du collaborateur en lien avec son travail qui devrait être pris en compte. L’indemnité resterait également due par l’employeur en cas de congés ou d’absence (par exemple en cas d’arrêts maladie, ou encore de congés maternité). La condition de revenus de 2 000 euros net par mois n’est pas réduite en cas d’absence.

 

Quelle période de versement ?

Cette prime a vocation à être versée en une seule fois au salarié, à la fin du mois de décembre (via la fiche de paie).

Le salarié n’a en soi aucune démarche à entreprendre : le versement de cette aide sera automatique par le biais de l’employeur.

Cette aide sera, dans un second temps, remboursée à l’employeur le mois suivant à travers une déduction des sommes versées des cotisations dues aux Urssaf au titre de la même paie (déduction de 100 euros x le nombre de salariés sur le même mois). L’indemnité sera également remboursée dans l’hypothèse où les cotisations dues par l’employeur  sont inférieures aux aides versées 

Concernant les entreprises, les paramétrages des logiciels de paie sont à anticiper pour éviter toute difficulté de versement et de remboursement. L’objectif des entreprises devraient être d’assurer sa conformité au dispositif, sa crédibilité vis-à-vis des salariés et sa gestion de trésorerie (Un versement trop tardif va-t-il freiner le remboursement par les caisses de sécurité sociale ?).

 

Quelle formalisation ?

Techniquement, la prime devra intégrer les bulletins de salaire des salariés éligibles.

Pour les entreprises et compte-tenu de son montant forfaitaire, aucune formalisation ne devrait survenir (accord collectif ou décision unilatérale).

 

Quid en cas de cumul d’activités salariées ?

Chaque salarié ne peut recevoir cette indemnité qu’une seule fois. Si un salarié a cumulé plusieurs emplois durant le mois d’octobre, c’est l’employeur principal de ce salarié qui est tenu de verser l’indemnité.

Selon l’exposé des motifs du projet de loi, l’employeur principal du salarié est celui avec lequel la relation de travail est toujours en cours, ou à défaut celui pour qui le salarié a effectué le plus d’heures de travail durant le mois d’octobre.

 

Quels enjeux pour les entreprises et quelle articulation avec les autres dispositifs salariaux ?

Liée au contexte de hausse importante des tarifs de l’énergie, cette indemnité n’est pas sans incidence sur le contexte social d’une entreprise.

L’annonce intervient tout d’abord en pleine période de négociations annuelles obligatoires sur les salaires effectifs, au sein des branches mais surtout des entreprises. Les discussions au sein de celles-ci demeureront animées puisque l’inflation est un paramètre fortement pris en compte dans les positions des partenaires sociaux. Pour certaines entreprises, le contexte de difficulté de recrutement impactera également l’approche des négociations. Enfin, la situation des collaborateurs non-éligibles au dispositif mais dont la rémunération est proche du seuil de 2 000 euros sera inéluctablement soulevée.

L’annonce intervient ensuite durant la période d’activation d’un autre dispositif exceptionnel : la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, elle-aussi potentiellement exonérées de contributions sociales et d’impôt (Lien pour en savoir plus). Au regard des annonces du gouvernement, une combinaison des deux dispositifs (PEPA et indemnité inflation) devrait être parfaitement autorisée.

Ce dispositif survient enfin en amont des fréquentes discussions de fin d’année relatives à la rémunération individuelle des collaborations. Là encore, aucun impact technique n’est à prévoir. Le contexte économique et social pourrait en revanche compliquer l’approche des managers.

Concernant les autres dispositifs d’épargne salariale (intéressement, participation…), il ne devrait pas être impacté par le dispositif. Il s’agit avant tout d’une indemnité versée à tout citoyen éligible en fonction des revenus et non un élément de salaire. Le concours recherché des entreprises est avant tout de faciliter le déploiement du dispositif, sans rechercher à modifier d’autres dispositifs préalablement appliqués.

 

Cet article a été écrit avec le concours de Julie FERNANDES, étudiante en Master 2 Droit Social Général


Guillaume Dedieu

Avocat associé, Paris

Après l'obtention de son Master 2, intègre plusieurs fédérations sportives pour intervenir sur les questions d'emploi, de ressources humaines et de relations sociales. Exerce en qualité d'avocat au sein du cabinet Ellipse Avocats depuis 2014 à Lyon puis à Paris. Devient associé du bureau parisien au 1er janvier 2020.

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