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Droit de la Protection Sociale, Droit de la Santé, sécurité au travail
par Sébastien Millet

Vers une reconnaissance améliorée des affectations psychiques (dépression, burn out, stress post-traumatique, etc.) comme maladie professionnelle


 

Nul doute que les pathologies affectant la santé mentale sont en constante progression et constituent un phénomène de santé publique préoccupant, notamment au niveau des entreprises.

 

La loi Rebsamen du 17 août 2015 a programmé la remise au Parlement avant le 1er juin 2016 d’un rapport gouvernemental sur l’intégration des affections psychiques dans le tableau des maladies professionnelles, ou l’abaissement du seuil d’incapacité permanente partielle pour ces mêmes affections.

 

Dans l’attente de ce rapport, un décret n° 2016-756 du 7 juin 2016 (applicable à compter du 10 juin 2016) vient préciser les modalités de procédure applicables à la reconnaissance comme maladie professionnelle des pathologies psychiques, dont la loi Rebsamen a souhaité améliorer la reconnaissance.

 

S’agissant de maladies « hors tableau » de nomenclature des maladies professionnelles, cette reconnaissance nécessite un avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) qui s’impose à l’organisme de Sécurité sociale (CSS, L461-1).

 

Cela suppose pour l’assuré social d’établir, en l’absence de présomption d’imputabilité, que sa maladie est directement et essentiellement causée par son travail habituel du salarié et qu’elle entraîne une incapacité permanente d’au moins 25 % (ou son décès). La déclaration de maladie professionnelle doit être faite auprès de la Caisse dans un délai de 2 ans à compter soit du jour de la cessation du travail liée à la maladie, soit de la date à laquelle la victime est informée du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle.

 

Une circulaire CNAMTS du 12 juin 2014 avait formulé des recommandations à destination des CRRMP en vue de faciliter la reconnaissance d’un lien de causalité « direct et essentiel » entre l’affection psychique et les conditions de travail.

 

Les cas d’affectations psychique étant très complexes, le décret prévoit désormais spécifiquement que le médecin-conseil ou le CRRMP fera appel chaque fois qu’il l’estime utile, à l’avis d’un médecin spécialiste ou compétent en psychiatrie.

 

Dorénavant (NB : cela sera valable pour l’ensemble des demandes de reconnaissance), l’avis motivé du médecin du travail et le rapport du service de contrôle médical de la Caisse seront communicables de plein droit à la victime et ses ayants droit. Ils resteront communicables à l’employeur uniquement par l’intermédiaire d’un praticien désigné à cet effet par la victime ou, à défaut, par ses ayants droit. Les conclusions administratives restent communicables de plein droit à l’employeur.

 

Cette procédure contradictoire ne doit pas être négligée par l’entreprise compte tenu des nombreuses conséquences découlant de la reconnaissance d’une maladie professionnelle, que ce soit sur le plan du droit du travail (cf. arrêt de travail, inaptitude, etc.) ou du droit de la Sécurité sociale (cotisations ATMP, faute inexcusable, etc.).

 

Dans ce cadre, il faut rappeler que le dossier d’instruction de la demande doit notamment comporter un rapport circonstancié de l’employeur de la victime décrivant notamment chaque poste de travail détenu par celle-ci depuis son entrée dans l’entreprise et permettant d’apprécier les conditions d’exposition de la victime à un risque professionnel (CSS, D461-29).

 

L’employeur peut être entendu par le CRRMP, si celui-ci l’estime nécessaire. Cela prend tout son sens lorsqu’il sera question d’apprécier le lien de causalité entre les conditions réelles de travail et la survenance d’une affection psychique (cf. RPS, harcèlement, etc.). Même si le Comité n’est pas compétent pour apprécier une éventuelle responsabilité de l’entreprise, l’employeur aura tout intérêt à mettre en avant ses actions et diligences en matière de prévention.

 

Face à l’augmentation très significative des troubles psychiques en entreprise, il faut s’attendre à une multiplication de ces procédures, que les pouvoirs publics veulent faciliter, face à un taux de reconnaissance qui reste statistiquement faible.

 

Sébastien Millet



Sébastien Millet

Avocat associé, Bordeaux

J'ai une activité multiple (conseil juridique, défense au contentieux, formation, enseignement et publications), mais un leitmotiv : la transversalité des disciplines et le management des risques humains sous toutes ses formes, au service de l'entreprise. L'exercice est aussi exigeant que passionnant.

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