par Arnaud Rimbert
La réforme du code du travail : que prévoit le Gouvernement ?
Depuis que le projet de loi autorisant le Gouvernement à réformer par ordonnance le Code du travail a été présenté officiellement le 28 juin 2017, les négociations officielles entre celui-ci et les partenaires sociaux dans le cadre de rencontres bilatérales se sont multipliées.
Le 13 juillet dernier les députés avaient autorisé le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance. Les sénateurs eux, viennent tout juste d’adopter le projet. Le gouvernement va pouvoir s’atteler à la rédaction des ordonnances qui doivent en principe être rendues publiques à la fin du mois. L’occasion de faire le point sur l’avancement du projet de réforme du Code du travail puisque l’on connaît d’ores et déjà un certain nombre de points essentiels.
L’augmentation des indemnités légales de licenciement et le plafonnement des dommages-intérêts
Tout salarié a droit à des indemnités légales de licenciement lorsque son contrat à durée indéterminée est rompu dans le cadre d’un licenciement pour motif économique ou personnel.
Si un tel licenciement est déclaré abusif, le salarié est en droit de demander en plus, devant le Conseil de Prud’hommes des dommages-intérêts.
Les indemnités légales de licenciement sont encadrées par la loi contrairement aux dommages-intérêts, même s’il existe pour ceux-ci un barème indicatif, qui en pratique n’est que peu utilisé.
Dès septembre ces dommages-intérêts seraient plafonnés dans une limite de 20 mois de salaire (a priori, un mois par année d’ancienneté), il n’y aurait cependant plus de minimum (contre 6 mois actuellement dès lors que le salarié a plus de deux ans d’ancienneté au sein d’une entreprise de plus de 11 salariés.
Les indemnités légales de licenciement quant à elles seront revues à la hausse (on évoque le doublement des indemnité).
La réduction des délais de contestation d’un licenciement
Actuellement le délai pour pouvoir contester un licenciement économique est de 12 mois, et de 2 ans pour les autres licenciements.
L’harmonisation de ces délais est prévue par le Gouvernement, ce qui se traduit ici par une réduction des délais de contestation.
Il est abordé une réduction « d’au moins de moitié » du délai actuel en le passant à un an.
La redéfinition du périmètre du licenciement économique
Jusqu’à présent l’appréciation des difficultés économiques lorsqu’un groupe international instaure un plan de licenciement en France se fait sur tous les sites du groupe, partout dans le monde.
Désormais le Gouvernement souhaite revenir à un plan périmètre national pour justifier les licenciements économiques.
Le risque est soulevé que certaines entreprises internationales créent des difficultés économiques fictives entre filiales pour pouvoir licencier en France alors même qu’elles font des bénéfices à l’étranger. Le projet de loi d’habilitation prévoit cependant que des « garde-fous » seront fixés dans les ordonnances pour limiter ces risques.
Il sera également possible pour le Gouvernement d’adapter les modalités de licenciements collectifs à la taille de l’entreprise et au nombre de ces licenciements, le seuil de déclenchement du PSE actuellement de 10 salariés, devrait normalement augmenté (a priori, il devrait tripler et passant à 30 salariés).
La sécurisation du recours au travail de nuit
Actuellement le travail de nuit se définit comme le travail qui s’effectue sur une période de neuf heures consécutives comprises dans l’intervalle minuit – 5 heures. Son recours doit être exceptionnel, justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale. La période commence au plus tôt à 21 heures et se termine au plus tard à 7 heures.
A défaut d’accord collectif le travail de nuit est effectué sur la période 21 heures – 6 heures. Il est possible de faire travailler son salarié, si un accord d’entreprise ou de branche le permet, de façon différée de 22 heures à 7 heures. Certains commerces font travailler leurs salariés en dépassant parfois sur les heures qui correspondent au travail de nuit.
Le projet de loi va permettre aux employeurs d’adapter cette plage horaire, pour que les salariés puissent dépasser de façon limitée la limite de 21 heures. De plus il va laisser aux accords collectifs la possibilité de redéfinir eux-mêmes le caractère exceptionnel du recours au travail de nuit, dans le respect du droit au repos et à la protection de la santé et sécurité des travailleurs.
La fusion des institutions représentatives du personnel
Aujourd’hui la représentation des salariés dans les entreprises de plus de cinquante salariés est morcelée en trois instances, que sont les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
Il est cependant possible de mettre en place une délégation unique du personnel dans les entreprises de moins de 300 salariés, et un regroupement d’institutions par accord majoritaire dans celles de plus de 300 salariés.
A partir du 1er janvier 2018, l’instance unique de représentation du personnel ne sera plus une possibilité mais deviendra une généralité.
Les entreprises dans lesquelles les mandats actuels ne seront pas terminés pourront reporter cette fusion, pour ne pas perturber le fonctionnement normal de l’entreprise.
Un accord d’entreprise pourra toutefois permettre la mise en place de la fusion avant l’échéance des mandats. Il pourra aussi déterminer la périodicité et le contenu des consultations et négociations obligatoires. Il a également été précisé que l’instance pourra recourir à divers types d’expertises, et bénéficiera des moyens nécessaires à l’exercice de ses compétences en matière de négociation collective.
La fiscalité hors contentieux favorisée
Aujourd’hui le régime fiscal des indemnités de ruptures accordées par le Conseil de Prud’hommes est plus avantageux que celui hors contentieux.
Le Gouvernement veut rendre plus intéressant fiscalement l’accord obtenu hors contentieux pour le salarié qui règlerait amiablement son litige.
La généralisation des plans de départs volontaires autonomes
Les plans de départs volontaires permettent lors d’un plan de licenciement, de laisser partir volontairement les salariés qui le souhaitent, avant d’en licencier d’autres s’ils ne sont pas assez nombreux à partir.
Ces plans de départs volontaires vont devenir autonomes par rapport aux règles du plan de sauvegarde de l’emploi s’il n’est pas prévu de licenciements en cas d’insuffisance de volontaires. L’employeur aura l’obligation de conclure avec les syndicats un accord définissant les conditions du départ volontaire. Ce dernier fera a priori l’objet d’une procédure d’homologation devant la DIRECCTE distincte de celle des PSE.
Article réalisé en collaboration avec Sarah LIGIER