Réflexion estivale #3
Quel impact (juridique) une relation adultérine avec une collègue (fait de la vie privée) peut-il avoir sur le contrat de travail ?
A la lumière de l’actualité (américaine) se pose la question de nos libertés individuelles.
La transparence, vous l’avez voulu, la voilà !
Un banal fait divers (en plein été) : un patron américain est pris « la main dans le pot de confiture » face caméra devant des millions de personnes dans les bras de sa maitresse, la DRH du groupe.
Scandale ? Oui plutôt oui, au pays du puritanisme hypocrite.
A tel point qu’il fut contraint de démissionner puisqu’une enquête interne étaient diligentée au regard de (potentielles) violations des règles de compliance / éthique du groupe.
La révélation/déflagration virale (et mondiale) de cette relation privée (et le bad buzz associé) a conduit à la rupture de son contrat de travail.
Les normes internes de la soft law anglo-saxonne (qui commencent à inonder nos groupes français mondialisés) conduisent à prohiber des comportements au regard des valeurs, de l’éthique et de la morale. Les garde-fous ne sont toutefois pas si nombreux dans un droit contractualisé, si ce n’est le respect des libertés fondamentales.
Mais le contrôle du Juge a posteriori est souvent bien trop tardif car l’enquête (ou la tempête médiatique) suffit bien souvent à éliminer le contrevenant.
Cela interroge sur les liens (parfois troubles) entre vie privée et vie professionnelle.
La jurisprudence (française) a récemment évolué en la matière : un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail, c’est à dire :
- principe : prohibition de licencier quelqu’un pour un motif tiré de sa vie personnelle ;
- exception : possibilité de licencier si le motif constitue un manquement à une obligation contractuelle.
A titre d’exemple, dernièrement, un DRH (délégataire de pouvoirs en charge des instances représentatives du personnel) avait camouflé sa relation (amoureuse) avec une représentante syndicale (impliquée dans des grèves et des négociations de PSE).
Quand la direction a découvert le « pot aux roses », il a été licencié pour faute grave.
Et la Cour de cassation a validé le licenciement pour faute grave, considérant «qu’en dissimulant cette relation intime, qui était en rapport avec ses fonctions professionnelles et de nature à en affecter le bon exercice, le salarié avait ainsi manqué à son obligation de loyauté à laquelle il était tenu envers son employeur et que ce manquement rendait impossible son maintien dans l’entreprise. » (Soc. 29 mai 2024 n° 22-16218)
Ce retour à la notion civiliste de loyauté, comme une obligation découlant du contrat de travail, est particulièrement appréciable et sécurisante juridiquement.
Moralité > garder le moral (et votre emploi), ou la morale… en étant loyal 😉
