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Droit de la Santé, sécurité au travail, Droit du Travail
par Sébastien Millet

Réforme de l’action administrative, à quoi faut-il s’attendre dans le domaine de la santé et sécurité au travail ?


Dans le prolongement de la modernisation de l’action publique et du « choc de simplification » annoncé, plusieurs modifications importantes susceptibles d’impacter les questions de santé et sécurité au travail sont à prévoir. Le point sur les évolutions attendues…

La première s’inscrit dans le sens d’une meilleure sécurité juridique des entreprises dans leurs relations avec l’administration du travail ; la seconde vise au contraire à renforcer l’action des Inspecteurs du travail auprès des entreprises en termes de contrôles et de sanctions.

 

1. Une nouvelle approche des relations des entreprises avec l’administration : le principe de la décision implicite d’acceptation

L’article 1er de la loi n° 2103-1005 du 12 novembre 2013 habilitant le gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens (JORF du 13 novembre 2013) vient modifier la règle traditionnelle selon laquelle « qui ne dit mot ne consent pas ». Très fréquemment, les demandes formulées auprès des services administratifs débouchent ainsi sur une décision implicite de rejet.

Désormais, c’est la règle inverse qui s’appliquera, le nouveau principe étant que « le silence gardé pendant deux mois par l’autorité administrative sur une demande vaut décision d’acceptation », ce délai ne courant qu’à compter de la réception des informations ou pièces complémentaires demandées si nécessaire par l’autorité administrative.

Pour ce qui concerne les actes relevant de la compétence des administrations de l’Etat ou des établissements publics administratifs de l’Etat, la loi prévoit que ce principe entrera en vigueur à compter du 12 septembre 2014.

La liste des procédures administratives concernées par ce nouveau principe, sera publiée et mise à jour sur le site internet des services du Premier ministre.

Signalons qu’en dépit de la volonté de simplification, cette règle comportera -comme tout principe- des exceptions. En particulier, il est prévu que le silence gardé par l’administration pendant deux mois vaut décision de rejet, notamment en cas de demande présentant le caractère d’une réclamation ou d’un recours administratif. Sont ainsi concernés les cas de recours gracieux ou hiérarchiques susceptibles d’être formés à la suite d’une décision d’Inspecteur du travail (autorisations, refus, dérogations, etc.).

Précisons en outre que certains types de décision sont soumis à des règles dérogatoires spécifiques en matière de recours, lesquelles restent inchangées (cf. par exemple les mises en demeure et demandes de vérification par l’Inspecteur du travail – C. Trav., R4723-1 et suivants).

 

2. Une future loi pour accroître l’indépendance et l’efficacité de l’Inspection du travail

Le Ministre du travail a dévoilé les contours du futur projet de loi sur la formation professionnelle et la démocratie sociale, qui devrait être présenté au Parlement début 2014 (cf. communiqué Conseil des ministres du 6 novembre 2013).

Ce projet s’articule autour d’une mesure-phare, très contestée, visant à faire migrer les Contrôleurs du travail (en charge des entreprises de moins de 50 salariés) vers le corps des Inspecteurs du travail. Un décret n°2013-875 du 27 septembre 2013, entré en vigueur le 1er octobre 2013, a déjà commencé à entamer cette évolution.

Précisons que les prérogatives des Inspecteurs du travail, définies aux articles L8112-1 et suivants du Code du travail, sont plus étendues que celles des Contrôleurs du travail, même si il existe un tronc commun applicable à ces deux corps.

Au plan de la santé et sécurité au travail, ce projet de réforme est surtout important de par l’élargissement des prérogatives existantes des Inspecteurs du travail, jugées insuffisamment efficaces.

Sans que les modalités ne soient à ce stade précisées, le Gouvernement souhaiterait élargir la possibilité pour les Inspecteurs du travail de prononcer l’arrêt de travaux en cas de situation dangereuse (procédure d’urgence), au-delà des cas limitativement visés par le Code du travail actuellement (cf. art. L4731-1 et 2).

Par ailleurs, en complément des dispositions existantes relatives à la possibilité d’adresser aux entreprises des observations ou mises en demeure avant établissement d’un procès-verbal, il serait envisagé :

  • D’une part, de renforcer les sanctions administratives, en habilitant les Inspecteurs du travail à prononcer des sanctions administratives financières en cas de non-respect de dispositions légales ou réglementaires (reste à définir lesquelles) ;
  • D’autre part, à renforcer l’effectivité et la rapidité des sanctions pénales, en élargissant aux contraventions prévues par le Code du travail, le recours aux ordonnances pénales (procédure simplifiée de jugement des contraventions à juge unique, sans débat contradictoire ni obligation de motivation – C. Proc. Pén., art. 524 et suivants), l’idée étant d’inciter les Parquets à mettre plus fréquemment en mouvement de l’action publique sur transmission de procès-verbaux de l’Inspection du travail, alors qu’un nombre significatif donnent lieu à classement sans suites d’après les statistiques ministérielles…

A noter enfin que l’organisation et les moyens des Inspecteurs du travail seraient renforcés par une série de mesures telles que :

  • Le renforcement de la protection des agents par une aggravation des peines en cas de délit d’obstacle (C. Trav. L8114-1 et suivants) ;
  • L’élargissement de l’accès aux documents demandés dans le cadre de contrôle sur place;
  • La constitution au niveau régional d’unités spécialisées sur certains risques particuliers ou certaines thématiques répondant aux priorités d’actions nationales des pouvoirs publics (travail illégal notamment).

Du côté des entreprises, la mise en place d’un corps unique d’Inspecteurs du travail disposant de prérogatives renforcées sera clairement de nature à accroître les contrôles en matière de respect de la réglementation du travail ; le risque de sanctions accrues ne peut donc qu’inciter à renforcer la démarche de prévention en matière de santé et de sécurité au travail.

Article rédigé pour Préventica : www.preventica.com



Sébastien Millet

Avocat associé, Bordeaux

J'ai une activité multiple (conseil juridique, défense au contentieux, formation, enseignement et publications), mais un leitmotiv : la transversalité des disciplines et le management des risques humains sous toutes ses formes, au service de l'entreprise. L'exercice est aussi exigeant que passionnant.

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