par Célia Ressaire
Liberté de circulation des IRP pendant une grève : restrictions en cas de comportement abusif
Dans un arrêt du 10 février 2021 la Cour de cassation a rappelé que la liberté de circulation des représentants du personnel et des représentants syndicaux au sein de l’entreprise est un principe d’ordre public, qui ne peut donner lieu à restrictions qu’au regard d’impératifs de santé, d’hygiène ou de sécurité ou en cas d’abus.
En effet, pour l’exercice de leurs fonctions, les salariés investis d’un mandat peuvent, en utilisant leurs heures de délégation, tant durant les heures habituelles de travail, qu’en dehors de celles-ci, circuler librement dans l’entreprise et y prendre tous les contacts nécessaires à l’accomplissement de leur mission, sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l’accomplissement du travail des salariés (C. trav., art. L. 2143-20 et L. 2315-14).
La Cour de cassation est venue préciser pour la première fois dans cet arrêt, que ce principe s’applique de la même façon en cas de mouvement de grève. Autrement dit, les représentants du personnel peuvent continuer à circuler librement dans l’entreprise durant leur participation à un conflit collectif (les mandats n’étant pas suspendus) et l’employeur peut restreindre cette liberté d’une manière nécessaire et proportionnée, en cas d’abus, de gêne anormale ou au regard d’impératifs de santé, d’hygiène ou de sécurité apporté à l’accomplissement du travail.
En l’occurrence, des représentants du personnel participant à un mouvement de grève déclenché dans un hôtel de luxe :
- utilisant des mégaphones et des sifflets dans les couloirs de l’hôtel,
- interpellant des salariés non-grévistes,
- distribuant des tracts aux clients,
- et entrant de force dans une chambre occupée,
adoptent un comportement, apportant une gêne anormale au travail des salariés et à la clientèle d’un hôtel, constitutif d’un comportement abusif.
Ainsi, les restrictions provisoires imposées par l’employeur, consistant dans un premier temps dans l’interdiction d’accès à l’hôtel, puis, après quelques jours, à conditionner l’accès à l’absence d’utilisation de matériel sonore et d’entrée dans les chambres de l’hôtel étaient justifiées et proportionnées aux abus constatés.
Cass. Soc., 10 févr. 2021, n° 19-14.021