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Droit du Travail
par Oxana Denfer

L'articulation entre la procédure de licenciement et le congé maternité


La salariée en congé maternité bénéficie de deux périodes de protection contre la rupture de son contrat de travail :

  • Période de protection absolue (pendant le congé maternité et la période de congés payés pris immédiatement après) : l’employeur ne peut pas rompre le contrat de travail, et ce même en cas de faute grave ou d’une impossibilité de maintenir le contrat.
  • Période de protection relative (pendant les 10 semaines qui suivent la fin du congé maternité ou des congés payés pris immédiatement après celui-ci) : l’employeur peut rompre le contrat s’il justifie d’une faute grave de l’intéressée ou de son impossibilité de maintenir son contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement.

 

Le point de départ de la période de protection relative

En principe, cette protection de 10 semaines commence à l’expiration du congé maternité ou des congés payés qui suivent immédiatement ce congé maternité.

La question se pose toutefois de l’incidence de plusieurs évènements qui arrivent ou pourraient arriver à l’issue des congés payés pris :

 

1. Incidence de la prise de RTT sur le point de départ de la période de protection relative

Tout d’abord, il est envisageable qu’une salariée prenne des jours de RTT à compter de l’expiration de son congé maternité ou des congés payés pris après ce dernier.

A notre connaissance, il n’a pas été tranché de savoir si les RTT accolés au congé maternité ou au congés payés (eux-mêmes accolés au congé maternité) ont pour effet de différer ou non le point de départ de cette protection de 10 semaines.

En effet, la loi dite « Travail » n’a traité que le sort des congés payés suivant immédiatement le congé maternité. Aucune réponse législative n’est donc apportée aux nombreuses autres hypothèses où la salariée ne reprend pas effectivement son poste au terme de son congé légal de maternité.

La Cour de cassation semble vouloir limiter expressément à une seule hypothèse la possibilité de reporter le point de départ de la protection relative, affirmant que « la période de protection de [quatre] semaines suivant le congé de maternité n’est suspendue que par la prise des congés payés suivant immédiatement le congé de maternité, son point de départ étant alors reporté à la date de la reprise du travail ». (Cass. soc., 14 septembre 2016, n°15-15.943 ).

En s’appuyant sur cette décision, on pourrait en déduire raisonnablement que si la reprise effective du travail est différée pour une autre raison que la prise immédiate de congés payés, telle que la pose de jours de RTT, la période de protection absolue ne serait pas étendue.

Néanmoins, un doute subsiste en l’état sur ce point, et le risque juridique est important puisqu’il réside dans la nullité du licenciement prononcé.

Dès lors, par précaution, il est préférable d’attendre l’expiration de la période de RTT pour enclencher la procédure de licenciement.

 

2. Incidence de la visite médicale de reprise sur le point de départ de la période de protection relative

A compter de la reprise effective du travail et au plus tard 8 jours calendaires après celle-ci, la salariée doit être soumise à un examen médical (C. trav., art. R 4624-31 et R 4624-32). Son objet sera d’apprécier son aptitude à reprendre son emploi.

La Cour de cassation a précisé que l’absence de visite médicale de reprise après un congé maternité n’a pas pour effet de différer la période de protection contre le licenciement (Cass. soc., 29 sept. 2004, n°02-42.461 ; Cass. soc., 15 déc. 2015, n°14-15.283 ; Cass. soc., 21 oct. 2020, n°19-20.570).

 Autrement dit, l’absence d’organisation de la visite de reprise à l’issue du congé de maternité n’a pas pour effet de différer le point de départ de la période de protection relative.

 

3. Incidence d’un arrêt maladie sur le point de départ de la période de protection relative

Enfin, il est tout à fait envisageable qu’une salariée soit placée en arrêt maladie à l’expiration de son congé maternité.

Le point de départ de la protection relative peut alors être impacté selon que l’arrêt maladie est lié ou non à l’état pathologique résultant de la maternité.

En effet, en cas d’arrêt maladie non lié à l’état de grossesse qui suit le congé maternité, la période de protection relative court pendant cette période d’arrêt, sans possibilité de report (Cass. Soc. 8 juillet 2015, n°15-15.979).

En conséquence, en cas d’arrêt maladie ordinaire, le point de départ de la période de protection relative de la salariée ne sera pas reporté.

En revanche, si la solution est claire en cas d’arrêt maladie « ordinaire », elle est plus incertaine lorsque cet arrêt maladie est lié à l’état pathologique résultant de la maternité.

Un arrêt maladie lié à l’état pathologique résultant de la maternité est en effet susceptible de reporter le point de départ de la période de protection relative, à condition qu’il puisse être qualifier de congé pathologique.

Le congé pathologique post-natal prolonge la durée du congé maternité dans la limite de 4 semaines (C. trav., art. L 1225-21).

Dès lors, la protection absolue s’applique pendant cette période et le début de la période de protection relative de 10 semaines est reportée (Cass. soc., 16 nov. 2011, n°10-14.799 ; Cass. soc., 14 sept. 2022, n° 20-20.819 ; CA Paris 6-5-2004 n° 02-37991).).

Ne sont toutefois concernées que les périodes d’arrêt de travail causées par un état pathologique résultant de la grossesse ou de l’accouchement, qui suivent de 4 semaines au maximum la fin du congé maternité.

Concrètement, à compter de la date de l’accouchement, la salariée bénéficie d’un congé maternité de 10 semaines, lequel est augmenté de 4 semaines en cas de congé pathologique.

Si le médecin prescripteur coche la case « en rapport avec un état pathologique résultant de la grossesse » sur le formulaire destiné à la sécurité sociale et à l’employeur, la salariée bénéficie donc, à compter de la naissance de l’enfant, d’une protection absolue contre la rupture de son contrat de 14 semaines.

 

L’articulation de la protection relative avec la procédure disciplinaire

Pour rappel, l’employeur qui souhaite rompre le contrat de travail en raison d’une faute grave du salarié doit respecter les délais suivants :

  • Délai de prescription des faits fautifs : la procédure de licenciement doit être engagée dans un délai maximal de deux mois à compter du jour où l’employeur a connaissance des faits fautifs (C. trav., art. L. 1332-4) ;
  • Délai de notification du licenciement : le licenciement ne peut être notifié ni moins de deux jours ouvrables ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien préalable (C. trav., art. L. 1332-2).

Aucune disposition légale ne prévoit que le congé maternité interrompt l’un ou l’autre des deux délais de prescription. A notre connaissance, la Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur le sujet.

Dès lors, si pendant la période de protection relative, l’employeur souhaite rompre le contrat de travail en raison d’une faute grave de la salariée, il devra veiller à respecter les délais imposés par toute procédure de licenciement disciplinaire.


Oxana Denfer

Avocat,

Passionnée par le droit du travail, j’ai pu, au cours de mes précédentes expériences professionnelles, intervenir dans un cadre contentieux pour la défense des intérêts des salariés. J’ai ensuite souhaité élargir ma pratique professionnelle en accompagnant les entreprises dans leurs dossiers conseil et contentieux. Durant ma formation à l’école des avocats, j’ai eu l’opportunité d'effectuer mon stage final au sein du cabinet ELLIPSE, dans lequel j’exerce désormais la profession d’Avocat.

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