par Ellipse Avocats
CCN des entreprises de prévention et de sécurité : précisions de la Cour de cassation sur les transferts de contrats de travail en cas de reprise d’un marché
S’ajoutant au transfert automatique des contrats de travail prévu, sous conditions, par le code du travail, la CCN des entreprises de prévention et de sécurité organise un transfert conventionnel du personnel en cas de changement de prestataire (avenant du 28 janvier 2011).
L’arrêt du 14 juin 2017 rendu par la Cour de cassation (n°16-11.465) implique deux sociétés de sécurité, l’une succédant à l’autre lors de la reprise d’un marché, et un salarié ayant refusé son transfert.
A l’occasion de l’établissement des avenants aux contrats de travail des salariés transférés, la société entrante a inséré une clause de mobilité non prévue dans le contrat initialement conclu avec la société sortante. En raison de l’introduction d’une telle modification, stratégique dans le secteur, le salarié considère que l’entreprise entrante manque à ses obligations conventionnelles issues de l’avenant du 28 janvier 2011, refuse de conclure l’avenant et sollicite une indemnisation (sur les conditions de validité d’une clause de mobilité, voir l’article d’Arnaud Rimbert).
L’entreprise entrante estime quant à elle avoir respecté ses obligations conventionnelles.
Rappelons que le transfert conventionnel impose qu’elle établisse « un avenant au contrat de travail dans lequel elle mentionnera le changement d’employeur et reprendra l’ensemble des clauses contractuelles qui lui seront applicables » (art. 3.1.1.). Les partenaires sociaux précisent ensuite que l’avenant doit obligatoirement mentionner la reprise de l’ancienneté acquise, de la classification, du salaire et du droit à congés (art. 3.1.2.).
Rien n’est cependant précisé s’agissant des autres clauses du contrat de travail.
Contrairement à la position adoptée par la Cour d’appel, la Cour de cassation déduit de ce silence l’impossibilité pour l’entreprise entrante de soumettre la reprise du salarié de la société sortante à son acceptation d’une clause de mobilité ne figurant pas dans son contrat de travail. Les conditions contractuelles antérieures doivent être préservées de toute évolution d’un élément substantiel, tel que le lieu de travail en l’occurrence.
Le salarié est ainsi fondé à engager une action indemnitaire contre l’entreprise entrante « qui a empêché sans raison légitime le changement d’employeur ». La Cour de cassation souligne d’ailleurs que cette action n’empêche pas une action contre l’entreprise sortante, notamment si celle-ci a rompu le contrat de travail.
A retenir :
– Cette décision ne concerne que l’hypothèse d’un transfert conventionnel des contrats de travail où aucune clause de mobilité n’est prévue dans les contrats initiaux des salariés repris.
– Les avenants notifiés aux salariés repris ne peuvent intégrer une clause de mobilité qui n’aurait pas été prévue initialement dans leur relation avec l’entreprise sortante.
– Plus largement, la Cour de cassation semble considérer que les obligations conventionnelles de l’entreprise entrante impliquent une reprise sans modification substantielle des conditions contractuelles liant le salarié à l’entreprise sortante.
– L’entreprise entrante demeure en mesure de proposer postérieurement à la reprise un avenant modifiant un ou plusieurs élément(s) du contrat de travail.
Xavier Aumeran
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