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Droit de la Santé, sécurité au travail, Droit du Travail
par Sébastien Millet

Qu'est-ce qu'un travailleur de nuit ? définition et déclinaisons pratiques (l'exemple de la pénibilité)


La loi définit le travail de nuit, comme le fait de travailler sur la période 21 :00 – 6 :00, sauf accord dérogatoire ou dans certains secteurs d’activité (radio, TV, … ) pour lesquelles d’autres plages de substitution sont autorisées (cf. C. Trav., L3122-29 et suivants).

Tout salarié amené à travailler sur la plage nocturne n’est pas pour autant bénéficiaire du statut de travailleur de nuit.

Cette qualification suppose en effet pour le salarié :

  • Soit d’accomplir selon son horaire de travail habituel, au moins 3 heures de son temps de travail quotidien durant cette période nocturne, et ce au moins 2 fois par semaine ;
  • Soit d’accomplir un nombre minimal d’heures de travail de nuit sur une période de référence fixée par voie conventionnelle (à défaut de convention ou d’accord collectif de branche étendu, c’est-à-dire en règle générale, il faut retenir un minimum de 270 heures de travail de nuit sur une période de 12 mois consécutifs).

Précision utile en pratique, la jurisprudence vient de juger que pour l’application de ce second seuil, et par alignement avec le premier, sont réputées accomplies toutes les heures comprises dans l’horaire de travail habituel du salarié et qu’en conséquence, doivent être prises en compte non pas le total des heures effectivement réalisées la nuit, mais l’horaire habituel du salarié (cf. Cass. Soc. 7 mars 2012).

Autrement dit, la référence à l’horaire collectif ou comme en l’espèce, aux heures payées sous l’intitulé d’« heures de nuit habituelles », prime sur la référence au temps de travail effectif réalisé la nuit.

Cela a toute son importance quand par exemple, le salarié relève du statut de travailleur de nuit au regard des heures de nuit mentionnées en paye, alors qu’en raison d’absences rémunérées, son temps de travail effectif en nuit conduirait au contraire à ce qu’il se retrouve en-deçà du seuil.

  1. Premier enseignement : la Cour de cassation cherche ainsi à éviter la « volatilité » du statut du salarié d’un mois sur l’autre selon les aléas de son activité (la période étant glissante).
  2. Second enseignement : les mentions du bulletin de salaire constituent un indice important au plan probatoire … d’où leur importance des rubriques et du paramétrage utilisés dans la paye.
  3. Troisième enseignement : cette clarification est importante afin de bien identifier qui est travailleur de nuit « statutaire » et qui ne l’est pas … on pense notamment –actualité oblige- au travail en cours dans les entreprises sur la prévention de la pénibilité.

Attention toutefois, car ici du point de vue de la définition du travail de nuit en tant que facteur de risque (C. Trav., D4121-5), sont visées les situations de travail de nuit, ce qui ne se limite pas aux seuls travailleurs de nuit.

En effet, même lorsqu’il est occasionnel, ou encore habituel mais moindre en volume (par exemple 250 heures sur l’année), le travail en plage nocturne constitue un mode atypique d’organisation du travail qui expose le salarié à certains risques pour la santé à long terme bien connus (surtout en cas de polyexposition). Il s’agit d’ailleurs d’un apport important du dispositif de pénibilité, puisque le travail ne nuit est désormais identifié comme un facteur de risque à part entière (alors que jusqu’à présent, seule était prévue une surveillance médicale renforcée au bénéfice des travailleurs de nuit).

L’ensemble des situations de travail de nuit  mérite donc d’être prise en compte, notamment dans l’évaluation diagnostic des situations de pénibilité, afin de les graduer et d’y apporter des réponses adaptées en termes d’action de prévention.

Cela illustre d’ailleurs les difficultés pratiques rencontrées concernant les seuils à retenir pour d’autres facteurs de risque (manutentions manuelles, postures pénibles, … ), ce qui invite à une certaine prudence dans les postulats de travail et les choix méthodologiques, en concertation avec les partenaires sociaux.



Sébastien Millet

Avocat associé, Bordeaux

J'ai une activité multiple (conseil juridique, défense au contentieux, formation, enseignement et publications), mais un leitmotiv : la transversalité des disciplines et le management des risques humains sous toutes ses formes, au service de l'entreprise. L'exercice est aussi exigeant que passionnant.

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