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Droit du Travail
par Guillaume Dedieu

Modulation du temps de travail dans le secteur de l’animation : quelles limites ?


La modulation du temps de travail permet de faire varier la durée du travail des salariés, à la hausse ou à la baisse, afin de s’adapter au rythme des activités de l’entreprise.

Ce dispositif, appelé aujourd’hui « aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine » dans le code du travail, neutralise le régime des heures supplémentaires.

Il nécessite la souscription d’un accord collectif pour être régulièrement mis en œuvre. Cet accord doit être conforme aux exigences du code du travail dans son contenu. L’employeur doit en outre s’assurer de sa bonne exécution en respectant les dispositions législatives et conventionnelles. L’accord préalable du salarié n’est ensuite plus requis depuis la loi du 22 mars 2012.

(à noter que la Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 permet dorénavant aux entreprises de mettre en place un dispositif de modulation par accord d’entreprise, peu important les éventuels clauses de « verrouillage » présentes dans l’accord de branche).

Dans le secteur de l’animation, la question se pose de savoir dans quelle mesure un tel dispositif de modulation peut être régulièrement mis en place.

C’est sur un tel litige qu’ont été amenés à se positionner récemment des juges du fond (CA Poitiers, 19-10-2016, n° 15/02529).

En l’espèce, un salarié soumis à un dispositif de variation de sa durée du travail sollicitait le paiement des heures supplémentaires accomplies durant ses périodes hautes de travail.

L’association lui opposait que l’article 5.7.1 de la CCN de l’animation mettant en place un dispositif de modulation annuelle sur la base de 35 heures par semaine lui était applicable.

Cet accord de branche prévoit les dispositions suivantes :

« La mise en place de la modulation est effectuée par accord d'entreprise négocié et signé avec un délégué syndical. Cet accord d'entreprise inscrit, dans une économie générale, des compensations variées aux contraintes de la modulation.

En l'absence de délégué syndical, l'employeur peut mettre en place une ou plusieurs des modalités ci-dessous (modulations types A et B), après information du comité d'entreprise ou des délégués du personnel lorsqu'ils existent.

Dans ce cas, le dispositif choisi devra figurer au contrat de travail des salariés concernés ».

Les juges vont alors interpréter cet accord en estimant que « la mise en place de la modulation, dans le secteur est subordonnée à un accord d’entreprise et à la mention de cette modulation sur le contrat de travail attestant de l’accord du salarié à cet aménagement du temps de travail ».

Ils en déduisent que l’employeur ne justifiant d’aucune de ces formalités de sorte, il ne pouvait  se prévaloir de l’application de la modulation à la durée du travail du salarié. En conséquence, si ce même salarié démontre ensuite qu’il a accompli des heures de travail au-delà de 35 heures n’ayant pas fait l’objet de contreparties, il serait en droit de solliciter le paiement des heures supplémentaires.

Il s’agit ici d’une position restrictive de la part des juges. En effet, il aurait très bien pu être considéré qu’en l’absence de délégué syndical ou de toute instance représentative du personnel, l’existence de l’article 5.7.1 devrait suffire à lui-même. On regrettera néanmoins de ne pas savoir les modalités de rédaction du contrat de travail du salarié concerné.

Il s’agit néanmoins d’une position déjà retenue par les juges du fond (CA Lyon, 27-06-2014, n° 13/08035).

Ces incertitudes invitent en conséquence à la prudence quant au recours à la modulation pour les entreprises du secteur de l’animation.

Attention, ce dispositif de modulation ne doit pas être confondu avec le régime du travail intermittent, également prévu dans la CCN de l’animation.

Il ne doit pas non-plus être confondu avec la situation des « professeurs » et « animateurs-techniciens » qui bénéficient d’un régime spécifique dans la CCN de l’animation (annexe 2)

Sur le même sujet, voir également :

 



Guillaume Dedieu

Avocat associé, Paris

Après l'obtention de son Master 2, intègre plusieurs fédérations sportives pour intervenir sur les questions d'emploi, de ressources humaines et de relations sociales. Exerce en qualité d'avocat au sein du cabinet Ellipse Avocats depuis 2014 à Lyon puis à Paris. Devient associé du bureau parisien au 1er janvier 2020.

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