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Droit du Travail
par Guillaume Ciancia

Contrôle de la DREETS sur les allocations d’activité partielle : comment réagir ?


Le dispositif de l’activité partielle, outil essentiel au service de la politique publique de prévention des licenciements économiques, a été fortement mobilisé depuis le 12 mars 2020 afin de faire face à la baisse d’activité engendrée par la crise sanitaire et ses conséquences pour les entreprises et les salariés.

La mise en œuvre des nouvelles modalités de ce dispositif, l’afflux très important de demandes et l’automatisation concomitante des dispositifs de validation des demandes sont susceptibles de générer un niveau élevé d’erreurs et de fraudes.

Au regard de l’importance des volumes financiers en cause, un plan de contrôle a posteriori est déployé afin de lutter contre la fraude et de régulariser les demandes d’indemnisation mal renseignées. Ainsi, les entreprises doivent rester vigilantes face à ces contrôles afin d’en anticiper les éventuelles conséquences.

En effet, certains contrôles vont générer des décisions de retrait d’autorisation entrainant des demandes de remboursement par l’employeur des aides accordées. Dans les hypothèses les plus graves, l’administration pourra engager des procédures de fraude à l’activité partielle constatées par procès-verbal prévue à article L8272-1 du Code du travail, avec un risque de redressement par l’URSSAF requalifiant les allocations perçues au titre de l’activité partielle en contrepartie d’un travail, en un revenu d’activité soumis à cotisations sociales.

Démontrer sa bonne foi

Lors du contrôle de la DREETS, l’employeur a la possibilité d’émettre des observations. Dans le cadre de ces observations, il lui reviendra en premier lieu de démontrer sa bonne foi lors du contrôle, en justifiant qu’il n’avait aucune intention de frauder.

En effet, en l’état, deux objectifs sont fixés par l’administration à travers ces contrôles, à savoir la lutte contre la fraude et la régularisation des demandes d’indemnisation mal renseignées. Ainsi, outre la régularisation des demandes d’indemnisation de l’activité partielle, la DREETS cherche également à déceler les fraudes potentielles des employeurs quant à l’usage de l’activité partielle.

En cas de fraude constatée par la DREETS à l’issue d’un contrôle, les conséquences peuvent être lourde pour l’entreprise. Outre les sanctions administratives, peuvent se cumuler des sanctions pénales allant du délit de fraude ou fausse déclaration (jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende ; C. pén. art. 441-6) à celui d’escroquerie (jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende).

A cet égard, la Cour de cassation a pu considérer comme constitutif de manœuvres frauduleuses le fait de formuler des demandes d’indemnisation de chômage partiel en produisant des états nominatifs par salariés non conformes à l’accord de modulation du temps de travail ni à la réalité de l’activité durant la période concernée, confortées par le non-établissement de documents qui auraient permis de contrôler leur régularité (Cass. crim., 27 juin 2018, n° 17-81.980).

Eu égard au risque d’une procédure pénale, une attention toute particulière devra être apportée à la justification de la bonne foi de l’entreprise.

Justifier du recours à l’activité partielle

En second lieu, les observations devront permettre à la société de démontrer que le recours à l’activité partielle se justifiait au regard de la situation de l’entreprise.

A ce titre, l’employeur peut placer ses salariés en position d’activité partielle lorsque l’entreprise est contrainte de réduire ou de suspendre temporairement son activité pour l’un des motifs suivants (article R.5122-1 du Code du travail) :

  • La conjoncture économique (récession, baisse des commandes, augmentation des stocks…) ;
  • Des difficultés d’approvisionnement en matières premières ou en énergie (difficultés dues à des grèves chez un fournisseur d’énergie ou une entreprise ferroviaire, par exemple) ;
  • Un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ;
  • La transformation, restructuration ou modernisation de l’entreprise (ce qui n’est pas le cas des travaux d’entretien ou d’embellissement, ni de la mise en conformité des locaux et du matériel) ;
  • Toute autre circonstance de caractère exceptionnel.

Si ces «circonstance[s] de caractère exceptionnel » liées l’épidémie de Covid 19 permettront de justifier d’un motif de recours à l’activité partielle, il conviendra dans le cadre des observations de démontrer l’impact de cette situation sur le fonctionnement de l’entreprise qui l’ont conduit à réduire ou suspendre temporairement son activité.

Contester le contrôle de la DREETS

A la suite de son contrôle, si elle estime que le recours à l’activité partielle n’était pas justifié, la DREETS notifie à l’employeur une demande de remboursement du trop-perçu au titre de l’allocation d’activité partielle.

Par la suite, et au fondement de cette décision, l’Agence de Services et de Paiement (ASP) adresse une décision de recouvrement.

Ces deux décisions sont susceptibles de recours dans un délai de deux mois.

  • Premièrement, il est possible d’engager des recours administratifs :
    • Auprès de l’auteur de l’acte, dans le cadre d’un recours « gracieux ». Ce recours sera adressé à la Direction Départementale de l’Emploi du Travail et des Solidarité compétente en contestation de la décision de la DREETS, et devant le Président directeur général de l’ASP pour la contestation de la décision de recouvrement de l’ASP.
    • Auprès du supérieur hiérarchique, dans le cadre d’un recours hiérarchique.  Ce recours devra être exercé, dans les deux cas, devant le Ministère du travail.

Ces recours ne sont pas alternatifs de sorte qu’il est possible d’exercer simultanément un recours gracieux et un recours hiérarchique.

Le silence gardé pendant plus de deux mois sur un recours administratif par l’autorité compétente vaut décision de rejet, qu’il est possible de contester dans le cadre d’un recours contentieux. (Article L. 411-7 du Code des relations entre le public et l’administration)

  • Deuxièmement, l’employeur peut saisir directement le Tribunal administratif dans le cadre d’un recours contentieux au moyen d’un recours pour excès de pouvoir.

Le recours contentieux peut être exercé soit simultanément, soit alternativement avec un ou plusieurs recours administratifs. L’exercice d’un recours administratif a en effet pour conséquence d’interrompre le délai du recours contentieux.

Ce n’est qu’en cas de recours forcé et pour suspendre l’exécution de la décision administrative que l’entreprise sera contrainte d’introduire, parallèlement à ce recours contentieux une procédure de référé suspension à l’encontre de la décision de la DREETS et de l’ASP auprès du juge administratif.

Le juge administratif se prononce alors dans un délai allant de 48 heures à un mois.

 

Post réalisé en collaboration avec Florian MANDON



Guillaume Ciancia

Avocat, Bordeaux

Après un stage réussi à la fin de ma formation à l'école des avocats, j'ai intégré l'équipe ELLIPSE AVOCATS en janvier 2019. Fort de mon expérience et ma formation, j'interviens auprès des clients pour les assister dans leurs dossiers conseil et contentieux en droit du travail et de la protection sociale.

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