par Sébastien Millet
De la difficulté d’indemniser le préjudice lié à l’exposition aux champs électromagnétiques
La Cour de cassation (3e chambre civile) vient se rendre un arrêt le 18 mai 2011 dans lequel elle donne raison à une Cour d’appel (Limoges) d’avoir débouté un exploitant agricole de son action en responsabilité délictuelle engagée à l’encontre de la société RTE (gestionnaires de nos « autoroutes » électriques) et visant à obtenir réparation des préjudices économique subis par son bétail exposé aux champs électromagnétiques (CEM) émanant de lignes à très haute tension (THT).
Dans son appréciation des éléments de faits qui constituaient le dossier, la Cour d’appel avait estimé qu’en l’état des connaissances scientifiques, il existe des incertitudes, voire des contradictions entre les études menées concernant les effets des CEM à basse fréquence sur les élevages.
Faute de consensus dans la communauté scientifique, les « indices » relevés n’étaient selon elle pas suffisamment concluants pour établir un lien de causalité direct et certain.
De manière classique, le demandeur défaillant sur le terrain de la charge de la preuve échoue ici dans son action ; non pas qu’il lui appartienne de prouver l’existence d’un lien de causalité certain, mais au moins suffisamment caractérisé.
L’attendu de l’arrêt apporte deux enseignements :
1°) Le lien causal ne nécessite pas nécessairement d’apporter une preuve scientifique définitive, mais peut être démontré à partir de présomptions qui doivent être cumulativement graves, précises, fiables et concordantes ;
2°) Selon la Cour de cassation, le plaignant ne peut pallier à l’insuffisance de cette preuve en invoquant les principes constitutionnels issus de la charte de l’environnement de 2004, tels que le principe de précaution (qui a un effet « vertical » et ne met d’obligation qu’à la charge des pouvoirs publics, contrairement au principe de responsabilité qui peut recevoir une application « horizontale » entre particuliers).
Cela a une résonance particulière, à l’heure où concomitamment, les données scientifiques évoluent s’agissant des risques d’expositions aux ondes électromagnétiques liés aux nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). Le contentieux face à ces risques dits émergents, que ce soit pour les personnes (particuliers & travailleurs) ou la biodiversité, est donc loin d’être tari …
électricité • exposition • indemnisation • NTIC • ondes • principe de précaution • responsabilité