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Droit du Travail
par Guillaume Dedieu

Congés conventionnels non-pris : la preuve n’incombe pas spécialement à l’employeur


Par convention ou accord collectif de travail, il est possible de prévoir un nombre de jours de congés payés supplémentaires pour les salariés.  Ces congés sont généralement qualifiés de congés conventionnels.

 

En matière de congés payés, conventionnels ou non, des conflits entre employeurs et salariés surgissent régulièrement lorsque le salarié n’a pu prendre ces jours de congés. Le salarié soutient alors régulièrement qu’il n’a pas été en mesure de prendre ses congés au regard de la charge de travail confié. Les employeurs évoquent en réponse que c’est le salarié lui-même qui n’a pas souhaité bénéficier de ses jours de congés alors même que les dirigeants ou son manager ne s’y sont nullement opposés, voire qu’ils ont tout fait pour s’assurer de leur prise effective.

 

Ce débat récurrent, et quelque peu inhérent aux relations de travail à forte responsabilité, se traduit concrètement devant les juridictions par des discussions sur la charge de la preuve. Que doit démontrer l’employeur ? Que doit démontrer le salarié ?

 

La règle applicable en matière de congés payés légaux est la suivante : la finalité des congés payés étant de préserver la sécurité et la santé des salariés, il appartient à l’employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu’il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement (Cass. Soc. 13 juin 2012 n°11-10929). En d’autres termes, c’est à l’employeur de démontrer qu’il a tout mis en œuvre pour organiser le départ en congés de ses salariés.  Le salarié devra donc juste se contenter, en amont, de démontrer que les congés payés n’ont pas été pris, ce qui est aisément démontrable à travers les bulletins de salaire.

 

Cette solution, parfois très difficile à gérer pour un employeur, devait-elle être étendue aux litiges relatifs aux congés conventionnels non-pris ?

 

La Cour de cassation a eu récemment l’occasion  de répondre par la négative (Cass. Soc. 12 mai 2015 n°13-20349).

 

En l’espèce, une convention collective de branche prévoyait que des congés payés supplémentaires étaient accordés aux personnels cadres des employeurs relevant de son champ d’application. A l’occasion d’un litige lié à son licenciement, un salarié a sollicité un rappel de congés conventionnels puisque ces derniers n’ont pu être pris dans leur intégralité.

 

Le salarié a été débouté par la Cour d’appel pour ne pas avoir établi lui-même qu’il n’avait pu prendre ses congés du fait de son employeur. Se fondant sur la jurisprudence applicable en matière de congés payés légaux (ci-dessus rappelée), le salarié a formé un pourvoi en cassation.

 

Ce pourvoi a été rejeté. La solution dégagée par la Cour de cassation en matière de congés payés légaux n’est donc pas applicable en matière de congés conventionnels. La haute juridiction estime en effet que « dès lors que le salarié avait pu prendre une partie de ces congés conventionnels et qu’il n’établissait pas n’avoir pu prendre le reliquat restant du fait de l’employeur, la cour d’appel a fait une exacte application de la loi ».

 

Autrement dit, il appartient au salarié  de démontrer que c’est en raison des agissements de l’employeur qu’il n’a pu être en mesure de prendre les jours de congés supplémentaires octroyés par la convention collective.

 

La Cour de cassation semble ici sous-entendre que la nécessité de protéger la santé et la sécurité des salariés, fondement même de la solution en matière de congés payés légaux, n’est pas à l’origine de l’octroi au salarié de jours de congés payés supplémentaires. En conséquence, on ne saurait faire peser sur l’employeur une obligation qui excède le cadre du droit au repos des salariés et la légitime protection de leur santé.

 

Il s’agit à mon sens d’une position équilibrée.



Guillaume Dedieu

Avocat associé, Paris

Après l'obtention de son Master 2, intègre plusieurs fédérations sportives pour intervenir sur les questions d'emploi, de ressources humaines et de relations sociales. Exerce en qualité d'avocat au sein du cabinet Ellipse Avocats depuis 2014 à Lyon puis à Paris. Devient associé du bureau parisien au 1er janvier 2020.

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