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Droit du Travail
par Céline Fouillet

La mobilité a ses raisons que la vie privée ignore….


Le salarié peut-il refuser d’appliquer une clause de mobilité prévue à son contrat de travail sous prétexte qu’elle porterait atteinte à sa vie personnelle et familiale ?

C’est précisément sur cette question que la Cour de cassation s’est penchée dans un arrêt rendu le 28 juin 2023.

1.     En principe, l’impossibilité pour le salarié de refuser l’application d’une clause de mobilité prévue à son contrat de travail 

La clause de mobilité est la stipulation d’un contrat de travail par laquelle un salarié accepte à l’avance que son lieu de travail puisse être modifié pour exercer ses fonctions dans les différents établissements, agences, succursales où l’entreprise déciderait de l’envoyer.

Pour être applicable, la clause de mobilité doit être licite et répondre, pour cela, à des conditions de validité.

mobilité

 

A ces conditions de licéité s’ajoute le fait que la clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d’application et ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée.

Tout l’intérêt de la clause de mobilité réside dans le fait qu’une fois admise dans le contrat de travail, elle interdit, sauf irrégularité ou abus, tout refus de mutation décidée par l’employeur en application de la clause.

La clause de mobilité est donc un outil très pratique pour l’employeur qui souhaite faire bouger l’un de ses salariés selon les besoins de l’entreprise !

Outil qu’il convient néanmoins de manier avec des pincettes puisque l’application d’une telle clause n’est pas si libre qu’elle puisse paraître.

En effet, l’employeur doit notamment avoir en tête que la mise en œuvre de la clause de mobilité doit respecter la vie privée et familiale du salarié.

2.     La nécessaire articulation entre la mutation du salarié et le respect de sa vie personnelle et familiale

L’article L1121-1 du Code du travail qui prévoit que « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».

C’est au visa de cet article que la Cour de cassation a rappelé, le 28 juin dernier, que lorsque la mise en œuvre de la clause de mobilité porte atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié, cette atteinte doit être justifiée par la tâche à accomplir et être proportionnée au but recherché, compte tenu de l’emploi occupé et du travail demandé.

Il s’agissait, dans ce cas d’espèce, d’un salarié qui avait refusé sa mutation à Cuba ou au Nigéria, pourtant conforme à la clause de mobilité prévue à son contrat de travail, au motif qu’elle portait une atteinte excessive à sa vie personnelle et familiale au regard des nécessités de scolarisation de ses enfants.

En raison de son refus, son employeur l’avait licencié, licenciement que le salarié avait ensuite contesté en justice.

Les juges d’appel avaient déduit que le salarié ayant refusé les affectations loyalement proposées dans le cadre de sa clause contractuelle de mobilité, son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse.

La Cour de cassation censure cette motivation dès lors que la Cour d’appel n’avait pas recherché « si la mise en œuvre de la clause de mobilité ne portait pas atteinte aux droits du salarié à une vie personnelle et familiale et si une telle atteinte pouvait être justifiée par la tâche à accomplir et était proportionnée au but recherché ».

Cette jurisprudence n’est pas nouvelle et vient s’ajouter à de multiples décisions rendues en ce sens. (Cass. Soc., 14 octobre 2008, n°07-40.523 ; Cass. Soc., 17 octobre 2012, n°11-18.029 ; Cass. Soc., 14 février 2018, n° 16-23.042 ; Cass. Soc., 26 septembre 2018, n°17-19.554).

L’application d’une clause contractuelle de mobilité n’est donc pas automatique et le refus du salarié de s’y conformer ne constitue pas forcément un fait fautif !

Réf : Cass. Soc., 28 juin 2023, n°22-11.227

Pour aller plus loin : https://www.ellipse-avocats.com/2012/08/il-y-a-mobilite-et-mobilite/


Céline Fouillet

Avocat,

Mes premières expériences en cabinet d'avocats m'ont permis d'avoir une approche globale de la matière sociale. Ayant débuté mon activité aux côtés de la défense des salariés, j'ai ensuite intégré le Pôle Social d'un Cabinet bordelais en charge, tant du conseil que du contentieux, d'un important groupe de boulangeries. J'ai rejoint le Pôle Judiciaire du Cabinet ELLIPSE AVOCATS en août 2022.

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