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Droit du Sport, Droit du Travail
par Guillaume Dedieu

Recrutement d’un éducateur en attente de diplôme : l’opportunité de la promesse d’embauche ?


Aux termes de l’article L.212-1 du code du sport, nul ne peut exercer une activité rémunérée d’animation,  d’encadrement et d’enseignement d’une activité physique ou sportive sans être titulaire du titre professionnel nécessaire ou sans être en formation pour l’acquisition de ce titre professionnel. A défaut, tant l’intervenant que l’organisme (associations, structures commerciales…) qui recourt à ses services sont susceptibles d’engager leurs responsabilités civiles et pénales.

 

Cette situation soulève, de manière récurrente, des problèmes quant à l’embauche d’éducateurs en cours d’acquisition du précieux sésame. En effet, l’obtention du diplôme permettant d’encadrer contre rémunération, ou l’entrée en formation en vue d’acquérir ce diplôme, exige de réussir préalablement une série d’examen (ou de tests d’entrée).  Or, par définition, ces examens impliquent un aléa quant à la réussite du candidat. Dès lors, comment un employeur peut-il s’engager contractuellement alors qu’il n’a aucune certitude sur la capacité prochaine du candidat à pouvoir légalement exercer des fonctions d’encadrement sportif contre rémunération ?

 

Le recours à une promesse d’embauche sous condition suspensive semble être aujourd’hui un cadre juridique approprié, comme en atteste une récente décision de la Cour d’appel de Lyon (CA Lyon Chbre A. 7 janvier 2015 n°12/03811).

 

En l’espèce, un club de hockey et un entraîneur avait conclu un accord écrit portant sur une embauche en contrat de travail à durée déterminée. Cet accord définissait les fonctions du salarié, ses conditions de rémunération et la période de travail. Cet accord contenait également une clause aux termes de laquelle l’embauche devenait définitive « sous réserve pour l’entraîneur de justifier d’être titulaire des qualifications exigées par la législation française en matière d’encadrement sportif contre rémunération et après résultats de la visite médicale d’embauche« .

 

La veille du début d’exécution du contrat de travail, l’employeur procédait à sa rupture au motif que l’entraîneur ne justifiait pas du diplôme nécessaire à l’exercice de ses fonctions.

 

L’entraîneur a contesté cette rupture en estimant qu’il ne s’agissait pas d’un cas autorisé de rupture d’un contrat de travail à durée déterminée. Le Conseil des Prud’hommes a accédé à la demande de l’entraîneur et condamné le club à verser l’ensemble des salaires dus jusqu’au terme du contrat. L’association sportive a dès lors interjeté appel.

 

La question se posait dès lors au juge de savoir si l’association sportive pouvait valablement mettre fin à l’accord écrit, qui n’avait pas reçu commencement d’exécution, en raison de la non-réalisation de la condition suspensive liée à l’absence de diplôme.

 

A cette question, la Cour d’appel va répondre par l’affirmative.

 

Dans un premier temps, les magistrats vont s’attacher à définir la qualification de l’accord écrit entre les deux parties. Ils rappellent ainsi que ledit accord définissait la fonction du salarié, ses conditions de rémunération et la période pour laquelle il a été conclu s’agissant d’un contrat à durée déterminée. Ils précisent également que cet accord contenait également une clause relative à l’obtention du titre professionnel obligatoire. Les juges en tire ensuite les conséquences en qualifiant le contrat de promesse d’embauche sous condition suspensive.

 

Il convient ici de rappeler que la promesse d’embauche est un contrat synallagmatique. A ce titre, elle a valeur de contrat de travail, si bien que les parties ne peuvent en principe se rétracter (Cass. Soc. 15 décembre 2010 n°08-42951). Comme tout contrat, il est toutefois possible de fixer une condition suspensive à son entrée en vigueur, suivant le régime de l’article 1181 du code civil.  Cette condition doit dépendre d’un évènement futur et incertain (existence d’un aléa). Dans cette situation, le contrat n’est pas définitif. Sa naissance ne surviendra qu’à compter de la survenance de l’évènement. A défaut, l’obligation contractuelle ne se forme pas.

 

Dans un second temps, la Cour d’appel a donc examiné si, lors de la date de la rupture de la promesse d’embauche, la condition suspensive liée à la détention du titre professionnel obligatoire s’était réalisée. Si oui, la promesse d’embauche serait définitive et prendrait assurément la valeur d’un contrat de travail. En l’espèce, il s’est avéré non-seulement que l’entraîneur ne disposait pas, au jour de la rupture de la promesse d’embauche, du titre professionnel obligatoire mais qu’il n’était pas non-plus en situation de formation en vue d’obtenir ce titre professionnel.  En effet, l’entraîneur a seulement établi qu’il était entré en formation plus d’un mois après la fin de la promesse d’embauche.

 

L’association sportive pouvait dès lors mettre fin à la promesse d’embauche, qui n’avait pas reçu de commencement d’exécution, pour non réalisation de la condition suspensive, en dehors des règles fixées à l’article L 1243-1 du code du travail.



Guillaume Dedieu

Avocat associé, Paris

Après l'obtention de son Master 2, intègre plusieurs fédérations sportives pour intervenir sur les questions d'emploi, de ressources humaines et de relations sociales. Exerce en qualité d'avocat au sein du cabinet Ellipse Avocats depuis 2014 à Lyon puis à Paris. Devient associé du bureau parisien au 1er janvier 2020.

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